Imaginez un roman qui vous happe comme un ouragan : un prophète traqué dans les ombres du Liban médiéval, un chimiste qui défie les lois de la matière sous un ciel apocalyptique, des duels sanglants au clair de lune parisien, et une secte maudite qui ressuscite des vengeances séculaires. Bienvenue dans Les Fils de Judas, le chef-d’œuvre absolu de Pierre-Alexis Ponson du Terrail, ce maître incontesté du roman-feuilleton qui, en 1867, a enflammé les imaginations du Second Empire. Paru en deux tomes chez Edmond Dentu – Un conte des Mille et Une Nuits et L’Amour fatal –, ce joyau oublié depuis 1874 renaît aujourd’hui pour vous, amateurs de littérature populaire. Claude Mesplède, dans son Dictionnaire des littératures policières, le couronne « chef-d’œuvre incontestable » : et il a raison ! Si vous dévorez les intrigues haletantes d’Eugène Sue ou les épopées folles d’Alexandre Dumas, ce roman est votre prochaine addiction. Plongez-y : vous en sortirez certes essoufflé, mais ensorcelé !
Ponson du Terrail, ce conteur de l’imaginaire
Tout commence en 1465, au cœur brûlant du Liban, où le grand Ma-Eddin, prophète visionnaire et illuminé charismatique, ose l’impossible : fonder une secte religieuse qui unit musulmans et chrétiens en un pacte mystique, un pont fragile sur l’abîme des haines ancestrales. Le 17 novembre, sous un ciel chargé de présages, naît cette confrérie secrète, semence d’une foi hybride qui défie les dogmes et promet une révélation universelle. Mais le destin frappe vite : les Ottomans, ombres impitoyables de l’Empire, lancent la persécution. Ma-Eddin fuit dans les ténèbres des montagnes, sa parole prophétique s’enfonçant alors dans la nuit comme un trésor enfoui. Pourtant, elle ne meurt pas : veillée par une poignée d’élus, transmise de génération en génération comme un feu couvant sous la cendre, elle attend son heure pendant quatre siècles, jusqu’à ce que le monde moderne, avec ses machines et ses doutes, soit prêt à l’accueillir… ou à en périr.
Retour au Paris de 1865, cette capitale haussmannienne grouillante de mystères, où le gaz des réverbères danse avec les ombres des boulevards. La ville s’abîme sous un orage biblique, un déluge qui noie les tours et lacère les cieux de foudres zébrées – une nuit d’apocalypse digne d’un tableau de Hugo ! Au cœur de ce chaos, dans le silence étouffé d’un laboratoire clandestin, le chimiste Callebrand veille comme un alchimiste des temps nouveaux. Seule la lueur rougeoyante du fourneau perce l’obscurité, un œil infernal qui fixe l’inconnu. Vingt ans de quête obsessionnelle culminent cette nuit-là : Callebrand perce le secret ultime, la malléabilité à froid des métaux ! Imaginez : de l’acier qui se plie comme de l’argile, des empires remodelés d’un geste, une révolution qui pourrait armer les justes ou noyer le monde dans le chaos.
Quelques semaines plus tard, le destin tisse ses fils ensanglantés. Raymond de Mahédin, descendant direct du prophète exilé, émerge d’un voyage énigmatique au Liban, chargé de reliques occultes et de secrets. À la tombée du soir, il s’engage sur la chaussée mal famée de Clignancourt, ce dédale pouilleux aux abords des buttes de Montmartre – repaire de voleurs et de rêves brisés. Direction : une maison isolée, nid de conspirateurs où l’air sent la trahison et l’encens. Mais une ombre l’agrippe : Sir Archibald, Anglais impétueux au sang-froid britannique, l’accoste et le provoque en duel ! Erreur fatale ? Les Fils de Judas veillent. Ils rôdent dans les ruelles sombres, ourdissant complots et assassinats, prêts à déchaîner l’enfer pour un dénouement cataclysmique.
Amour fatal, passions dévorantes, révélations qui font trembler les fondations du réel : tout converge vers un climax prodigieux.
Et c’est là que Ponson du Terrail déploie son art suprême : le rocambolesque pur, cet ouragan d’aventures étourdissantes qui emporte ses personnages – et vous avec ! – dans un vertige de rebondissements. Poursuites effrénées à travers les toits de Paris, duels au pistolet sous la pluie, amours impossibles qui consument les âmes, et un ésotérisme oriental puisé aux Mille et Une Nuits qui irrigue le bitume haussmannien. Ce n’est pas un simple polar avant l’heure ; c’est une fresque noire et romantique. Ami lecteur, si vous chérissez les héros tourmentés de Monte-Cristo ou les mystères enfiévrés des Mystères de Paris, Les Fils de Judas est votre prochain livre de chevet !
