La philosophie des mathématiques de Kant

Louis Couturat

On a reproché à cette étude de n’être pas assez historique, de ne pas se replacer suffisamment au point de vue et au temps de Kant. Assurément, nous n’avons pas cru devoir en éliminer toute préoccupation critique ou dogmatique. Mais, alors que tant d’historiens ont profité du centenaire de la mort de Kant pour comparer sa doctrine aux idées du temps présent, et ont cru pouvoir la louer de s’accorder avec elles, en vanter la vitalité et la modernité, nous avions bien le droit d’instituer, en un autre domaine, une comparaison semblable et d’en tirer, dans ce domaine, des conclusions moins favorables au kantisme. Exiger qu’on juge toujours un philosophe «de l’intérieur», à son point de vue et à celui de son temps, c’est admettre qu’il n’y a pas de vérité en philosophie, qu’un système philosophique est une œuvre d’art qui ne vaut que par son unité intrinsèque et son harmonie. D’ailleurs, même à ce point de vue, le système de Kant reste encore sujet à critique. Son savant commentateur n’a-t-il pas déclaré que «la Critique de la raison pure est l’œuvre la plus géniale et la plus pleine de contradictions de toute l’histoire de la philosophie» ? Nous avons eu l’occasion (et l’audace) de remarquer quelques-unes de ces contradictions. En philosophie comme ailleurs, le respect superstitieux du fait historique aboutit au dilettantisme et au scepticisme.

12×16 cm – 160 pages

15,20